DKpit « Zamal Paradise est le premier film la kour international! »


Rédigé le Mardi 30 Novembre 2021 à 14:41 | Lu 780 fois modifié le Mardi 30 Novembre 2021

Un cocktail d’émotions intenses, des dialogues en créole pimentés, un métissage de genres cinématographiques… DKpit nous offre les prémisses du cinéma réunionnais avec son premier long-métrage, Zamal Paradise, produit par Réunion Magma Films.



COMMENT EST NÉ CE PROJET ?

L’ambition était que les Réunionnais aient une oeuvre cinématographique. En effet, pour la première fois, ils vont se voir à l’écran. Et en plus de 120 ans de cinéma ça n’est jamais arrivé ! C’est d’ailleurs pour cela que j’ai opté pour l’utilisation du créole afin d’ancrer mon intrigue dans le réel réunionnais. Cette langue des quartiers, c’est la mienne. Je la maîtrise et l’écris sans peine. Je considère que le cinéma réunionnais devra nécessairement parler créole. C’est son ADN, son marqueur identitaire. Cependant, l’universalité est là malgré tout car le cinéma local doit aussi être ancré dans l’ensemble du cinéma mondial.

​COMMENT AVEZ-VOUS TRAVAILLÉ SUR ZAMAL PARADISE ?

Cela fait près de cinq années que l’on travaille avec Kenlo et King Tafari. Nous avons commencé par étudier les grands maîtres du 7ème art et les différents courants cinématographiques du XXe siècle pour en arriver là. Robert Bresson, Kubrick, Kurosawa, Tarkovski, Godard, Hitchcock… la liste est longue. On a regardé, décortiqué, analysé de nombreux films pour qu’on soit tous sur la même longueur d’ondes, dans la même vision du cinéma.

​DE QUOI PARLE LE FILM ?

J’ai grandi dans la cité de Château Morange et Zamal Paradise a été écrit à partir d’observations, de souvenirs et de moments vécus. Dans ce film je dépeins une autre réalité et pas les clichés habituels « hôtel, plage et coquillages ». Mon film parle aussi de mon observation du monde actuel. Nous vivons dans une société où l’esthétique est triomphante, où la publicité est devenue le baromètre de nos valeurs. Que tu sortes d’une cité ou pas, tu dois faire face aux préjugés. Chaque jour, on veut t’enfermer dans des cases, selon ton orientation sexuelle, ta classe sociale, tes croyances ou ta couleur de peau…Ce film parle de ceux qui brisent les chaînes de leur destinée, de ceux qui luttent face au déterminisme social. Zamal Paradise «Les voies du seigneur sont absurdes» !

​SI VOUS DEVIEZ RANGER VOTRE FILM DANS UN GENRE CINÉMATOGRAPHIQUE…

Mon film est un mélange de genres, à l’image de La Réunion, un film métissé. C’est un film de rue mais qui ne ressemble en rien à un film de banlieue français. Il y a aussi de la comédie, du thriller, du drame et d’autres genres qui se mêlent comme dans le cinéma coréen qui explose actuellement. J’ai construit mon récit par rapport à mon vécu. Et selon mon expérience, la vie n’est pas linéaire, c’est un mélange permanent. C’est pareil dans le film, c’est intense au niveau émotionnel. Et c’est un film riche, il y a du rythme, on ne s’ennuie pas. On a au minimum 4 niveaux de lecture avec des histoires qui s’entremêlent.

​QUEL EST VOTRE MESSAGE À TRAVERS VOS HÉROS ?

Cela traite du passage de l’enfance à l’âge adulte, de la naïveté à la lucidité. C’est une sorte de parcours initiatique, une démonstration de la citation d’Erasme: l’Homme ne naît pas Homme, il le devient!». Nos héros apprendront qu’atteindre un but, réaliser son rêve n’est pas une question de vitesse mais de persévérance, de patience et d’humilité. Ils empruntent des voies pas toujours légales ni conventionnelles mais qui génèreront des répercussions positives sur leur développement personnel et leur façon de voir le monde qui les entoure. Je n’essaye pas de guider les gens, c’est au spectateur de se faire sa propre analyse. Mais je fais en sorte de toucher tout le monde. Mon objectif est de faire réfléchir le spectateur sur certaines vérités sans lui prendre la tête. J’aime montrer le côté mauvais de l’humain pour pouvoir en révéler la grâce.

​QUELS SONT VOS PROJETS APRÈS ZAMAL PARADISE ?

Suite à la nomination de Kenlo aux Sotigui Awards et à son séjour au Burkina Faso, on sait que des sociétés de production africaines ont envie de collaborer avec nous. Avant, il faut avouer qu’on partait plutôt sur des projets focalisés France, Europe, Canada… Mais on a des personnes très influentes du cinéma en Afrique qui ont été dithyrambiques à propos de notre travail donc nous aimerions poursuivre aussi dans cette direction et mettre en place des co-productions avec ces pays d’Afrique. Nous avons été repérés par un distributeur international, notre film sera distribué dans d’autres pays un peu partout sur la planète.

​APRÈS DE NOMBREUSES NOMINATIONS À L’INTERNATIONAL, LES RÉUNIONNAIS VONT ENFIN POUVOIR DÉCOUVRIR ZAMAL PARADISE…

Le Covid nous a fait décaler plus d’une fois la sortie du film… Mais bon quoi qu’il arrive, le film sort au Cinépalmes le 20 décembre, une date symbolique car quelque part, je pense qu’on libère le cinéma réunionnais, on le démocratise. C’est la première fois que l’on peut s’exprimer via ce médium et qu’on est libre de dire ce que l’on a à dire. C’était un défi, il ne fallait pas se rater et le CNC nous a validé, nous avons obtenu l’avance sur recettes après réalisation. Maintenant, nous avons hâte de voir comment la population va s’accaparer cela. Mais c’est vrai que ce n’était pas gagné et que notre entourage nous a parfois pris pour des fous. C’est une révolution culturelle quelque part !

Propos recueillis par Laetitia Parsi

Zamal Paradise, le pitch: Pour produire leur album musical, trois jeunes au chômage Kingta, Kévin et Kenlo jouent aux apprentis dealers. Novices dans ce milieu, ils se font déposséder de toute la marchandise. Contraints d’honorer leur contrat auprès de leur commanditaire, un dangereux businessman excentrique, les trois jeunes hommes vont devoir emprunter des voies hasardeuses. Parviendront-ils à rester maîtres de leur destinée ? Les voies du seigneur sont absurdes.

DKpit, la bio Après une école d’Arts Appliqués et une spécialisation en cinéma d’animation, DKpit se lance dans la production, l’écriture et la réalisation. Si en 2001, il fonde un groupe de rap pour lequel il est auteur, chanteur et réalisateur, six ans plus tard, il décide de se consacrer exclusivement à l’écriture et à la réalisation de fiction. Il devient rapidement un réalisateur en vogue dans le milieu publicitaire de l’Océan Indien. En 2009, il co-écrit et fait produire son premier court-métrage « La Nature des Monstres ». En 2016, il met en place un atelier coaching pour former au métier d’acteur, les rôles principaux de son premier long-métrage « Zamal Paradise ».

Réunion Magma Films, le CV par la productrice Sandra Bonino « Réunion Magma Films a été créée en décembre 2014 dans le but de produire et réaliser des films cinématographiques (courts et longs métrages), des programmes audiovisuels et des oeuvres multimédias. Une autre de nos activités est le développement d’activités en pré et post-production (direction artistique, story-board, prévisualisation, montage, effets spéciaux…). Depuis notre création, nous avons collaboré avec des auteurs, réalisateurs et producteurs locaux tels que Laurent Pantaléon : « La Face Cachée du Père Noel – 2015 », William Cally: « Madame Desbassayns – 2015 », « Baba Michelin - 2016 », «La Buse - 2018» ou encore l’auteure-réalisatrice Julie Jouve « Photocall – 2021 »... En 2021, notre grosse actualité est la sortie de notre film « Zamal Paradise ».